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Tunisie Actualité

Tunisie: Quels rapports entre les régions après la révolution?

Le 20ème forum de l’ATUGE à Paris a débattu de la refonte de la stratégie nationale de développement et des nouveaux rapports entre «centre» et régions dans la Tunisie post-révolution.
En modifiant la répartition du budget de l’Etat au titre de l’année 2011 entre les régions côtières et celles de l’intérieur, le gouvernement intérimaire, présidé par Béji Caïd Essebsi, a montré qu’il a bien compris le message véhiculé par la révolution: le «gâteau» national, en l’occurrence les moyens et les fruits du développement, ne peut plus continuer à être réparti aussi injustement qu’avant le 14 janvier 2011. Mais aussi perspicace soit-elle, la décision du gouvernement d’allouer autrement les ressources nationales au cours du reste de cette année est insuffisante. Car c’est toute la philosophie, les objectifs et les méthodes de la stratégie de développement qui vont devoir être modifiés radicalement.
Déjà engagé en Tunisie, ce débat a dominé l’un des ateliers du dernier forum de l’ATUGE(Association des Tunisiens diplômés des grandes écoles), tenue dimanche 19 juin 2011 à Paris, qui devait débattre de l’«infrastructure de transport pour une meilleure répartition territoriale».
Le changement devra d’abord être culturel, affirme Boujemaa Remili. «Nous sommes dans une rupture épistémologique qui doit rejaillir sur le technique lequel doit rester au service du politique».
Outre «une volonté politique à mettre en place», Ahmed Rekik, principal à Roland Berger, entrevoit un autre problème, d’ordre budgétaire qui pourrait se poser. «Les budgets ne sont pas infinis, c’est pour cela qu’il faut être réaliste, car la marge de manœuvre est extrêmement faible», confirme Kamel Talbi, responsable au Service Etudes Générales, Economiques et de Transport, SCET Tunisie.
Alors qu’on parle aujourd’hui d’un «plan Marshall de 125 milliards de dollars», Walid Belhaj Amor estime que «ce serait trop d’argent qu’on ne saurait gérer». Il pense qu’on en serait plus probablement «aux alentours de 20 milliards de dollars pour les vingt prochaines années», venant de trois sources: endettement, partenariat public/privé (PPP) et investissement privé. D’autant que «la situation de la Tunisie ne permet pas un endettement de plus de 4 milliards de dollars», calcule le directeur général adjoint de Comete Engineering. Selon lui, les autres seize milliards de dollars pourraient provenir du PPP et de l’investissement. Conscient de l’importance du rôle du privé, Kamel Talbi conseille de «travailler sur le plan institutionnel pour mettre en place les outils et le cadre» pour l’intéresser à l’investissement à la faveur de la nouvelle stratégie de développement.
Boujemaa Remili ne pense pas que la Tunisie ait un problème budgétaire ou financier puisque «nous avons un taux d’investissement ridicule, avec 24% du produit intérieur brut, contre plus de 30% et même 40% en Asie». La solution serait donc plutôt, d’après lui, de «passer à un modèle de croissance plus élevée et dépasser l’économie actuelle qui ronronne». Et cela semble, à cet expert, à la portée «si on met en place un système démocratique et un meilleur partenariat avec l’Europe». Le cas échéant, la Tunisie pourrait prétendre à un taux de croissance de 7 à 9%.
La refonte de la stratégie nationale de développement nécessite également une réorganisation administrative du pays, afin de «trouver un équilibre entre les régions et le centre», observe Boujemaa Remili. Selon le d-ga d’Idea Consult, il existe aujourd’hui en Tunisie un débat sur la création de «régions ayant entre 1 million et 1,5 million d’habitants et qui peuvent tenir tête centre». Mais parce que «la révolution est venue des régions», cet expert doute que «les esprits soient aujourd’hui ouverts à un discours prônant la constitution de pôles régionaux regroupant plusieurs villes».

Webmanagercenter.com,25/06/2011
Moncef Mahroug